Soupe aux gourganes de Mme Morneau

Ah, la rentrée! Même s’il s’agit d’une indication que l’été tire à sa fin, j’ai toujours aimé la période de la rentrée. Ça me retransporte dans mon Rimouski natal et me fait retomber en enfance. Petit, j’ai toujours aimé la rentrée, l’idée de retourner à l’école et d’étrenner mon nouveau matériel scolaire soigneusement choisi (même enfant je voulais que les choses «fittent» ensemble), de retrouver les amis, de retrouver les bancs d’école. Le bruit de l’autobus scolaire qui tourne le coin de la rue, l’odeur des crayons de bois, la douceur d’un nouveau pull d’automne sont toutes des choses qui créaient chez moi une agréable fébrilité. Encore aujourd’hui, même si ça fait 20 ans que je n’ai pas vécu une vraie rentrée scolaire, je ressens la même chose. Aussitôt que je vois le «stock d’école» apparaître sur les tablettes des magasins, je pense à mon enfance et à mes années scolaires à Rimouski.

Une autre chose que la rentrée évoque et qui restera gravée à jamais dans ma mémoire, ce sont toutes ces années, de la petite enfance jusqu’au début de l’adolescence, passées chez Monsieur et Madame Morneau. À chaque rentrée je pense à eux, un couple que j’ai toujours considéré comme mes 3e grands-parents et qui a grandement forgé la personne que je suis aujourd’hui. Mme Morneau opérait chez-elle une petite garderie et j’y passais mes journées de semaine ou encore j’y rentrais après l’école ou le midi pour l’heure du lunch. Et sa cuisine, bien que simple et modeste, faisait toujours mon bonheur. Elle cuisinait divinement bien et possédait beaucoup de recettes bien à elle que je ne retrouvais pas ailleurs. C’est chez Mme Morneau que j’ai découvert pour la première fois les gourganes avec sa fameuse soupe aux gourganes!

Pour cette publication, c’est donc un petit retour en enfance que je vous propose pour souligner la rentrée, mais aussi pour rendre hommage à cette chère Mme Morneau. C’est n’est par contre PAS de SA recette car je ne l’ai jamais su… malheureusement. Il s’agit donc d’un simple clin d’œil. Que voulez-vous, quand je vois les gourganes arriver au marché, je pense à elle et à son incontournable soupe aux gourganes que j’adorais tant et dans laquelle je m’empressais d’émietter une quantité exagérée de biscuits soda. Plus de 30 ans plus tard, je me souviens encore de ce bonheur et j’ai donc tenté de le recréer ici.

M. et Mme Morneau, si vous tombez sur cette publication, sachez à quel point vous avez été importants pour moi et que je ne vous ai jamais oublié. Acceptez mes plus sincères salutations. Merci!

SOUPE AUX GOURGANES DE MME MORNEAU

__ INGRÉDIENTS

115 g (1/4 lb) de lard salé entrelardé, coupé en deux

227 g (1/2 lb) de cubes de bœuf à mijoter, coupés en plus petits dés

1 oignon, haché

3 gousses d’ail, hachées

2 carottes, tranchées en rondelles

1 branche de céleri, hachée

125 ml (1/2 tasse) d'orge perlé

1.5L (6 tasses) de bouillon de poulet sans sel ajouté

375 ml (1 1/2 tasse) de gourganes fraîches écossées

60 ml (1/4 tasse) de ciboulette fraîche ciselée

poivre du moulin

herbes salées du Bas-du-Fleuve, au goût

__ PRÉPARATION

Dans une casserole, faire revenir le lard à feu moyen jusqu’à ce qu’il rende un peu de son gras. Ajouter la viande, l’oignon et l’ail et faire dorer à feu vif. Ajouter la carotte, le céleri et l’orge. Laisser cuire 3-4 minutes en remuant pour bien nacrer l’orge. Assaisonner de poivre et d’herbes salées au goût.

Ajouter le bouillon et porter à ébullition. Couvrir et laisser mijoter 25 minutes ou jusqu'à ce que l'orge soit tendre. Ajouter les gourganes et poursuivre la cuisson environ 5 minutes à découvert, jusqu'à ce qu'elles soient tendres. Retirer les morceaux lard et ajouter la ciboulette. Rectifier l'assaisonnement.

Servir la soupe avec des biscuits soda si désiré.

6 à 8 portions

Photos : Jonathan Michaud

__ NOTES

Les gourganes : Les grains de gourganes sont recouverts d’une membrane épaisse qui protègent la fève. Plusieurs prennent le temps de les retirer pour que les gourganes soient bien vertes à l’œil, mais ce n’est pas obligatoire du tout. Personnellement, je les garde car elles évitent que la fève devienne trop molle et perde son intégrité en cuisson prolongée. Si vous avez du temps et que vous préférez tout de même les peler, voici comment faire : blanchir rapidement dans une casserole d'eau bouillante environ 1 minute. Égoutter et plonger dans un bol d'eau glacée. Retirer l'enveloppe du grain.

Je n’encourage pas l’utilisation de gourganes en conserve, le résultat sera vraiment moins intéressant. Cependant, si vous en trouvez dans le rayon des produits surgelés, c’est une bonne alternative aux gourganes fraîches.

Les herbes salées : Produit unique issu du terroir québécois, les herbes salées du Bas-du-Fleuve sont une curiosité de notre héritage culturel et culinaire. Elles sont tellement intégrées dans nos us et coutumes que l’on oublie qu’elles sont littéralement inconnues dans le reste du pays et encore plus à l’étranger. Si vous ne connaissez pas, sachez que les herbes salées résultent d'un mélange de fines herbes et de légumes finement hachés et macérés dans le sel. Elles sont composées de céleris, d’oignons, de gros sel, de carottes, de panais, de persil, de cerfeuil, de sarriette, de poireaux, de ciboulette et parfois d’épinards. C’est un produit que l’on utilise pour saler différents mets comme les soupes, les sauces, les purées, le riz, les poissons, les viandes et certains plats traditionnels en croûte. Bref, il remplace le sel standard dans plusieurs de nos préparations tout en ajoutant un distinctif parfum herbacé.

Si vous venez de l’étranger et que vous êtes de passage au Québec, voilà définitivement un produit typique d’ici à ramener dans vos valises. Comme quoi il n’y a pas que le sirop d’érable!

Et si vous voulez préparer vous-même vos herbes salées, je dépose ici une recette maison. Sachez que c’est une recette extrêmement difficile à standardiser car il n’existe AUCUNE recette officielle nulle part. Chaque famille québécoise a sa propre recette et cette dite recette peut changer selon les années! Le principe est de mettre ce qu’on a de disponible dans le jardin ou au marché et on ajuste au besoin. Une règle générale à respecter est la proportion de sel versus les herbes et les légumes. Le mélange doit être constitué de 1/3 de sel pour 2/3 du reste des ingrédients, proportions mesurées en fonction du poids et non du volume.

HERBES SALÉES DU BAS-DU-FLEUVE MAISON

__ INGRÉDIENTS

205 g (1 1/2 tasse) de carottes hachées très finement (ou de panais ou un mélange des deux)

145 g (1 1/2 tasse) de poireaux hachés très finement (partie blanche et verte)

70 g (1/2 tasse) de céleri, haché très finement

40 g (1 1/4 tasse) de persil frisé, ciselé

10g (1/4 tasse) de cerfeuil, ciselé

10 g (1/4 tasse) de ciboulette ciselée

10 g (1/4 tasse) de sarriette ciselée

10 ml (2 c. à thé) de thym ciselé

5 ml (1 c. à thé) de romarin ciselé

4 oignons verts, hachés finement

+/- 250 g (1 1/4 tasse) de gros sel

__ PRÉPARATION

Hacher tous les légumes et les herbes très finement au couteau ou au robot culinaire et transférer dans un grand bol en verre. Ajouter le gros sel et bien mélanger.

Déposer le mélange dans des pots de verre et entreposer le tout au réfrigérateur pendant au moins 2 semaines avant d'utiliser. Les herbes salées se conservent plusieurs mois, préférablement au frais.

Rendement : environ 1 litre